7h le réveil sonne et on enfile vite nos habits de ski préparés la veille : organisation optimale. Une tartine de pain supplémentaire au petit-déjeuner pour avoir de quoi tenir jusqu’au pique-nique en milieu de parcours ; depuis hier soir, Guillaume a hâte d’être à ce midi tellement le sandwich est copieux et alléchant. Chacun sa motivation. Nous avons une bonne demi-heure avant le rendez-vous prévu pour les formalités de l’excursion donc on en profite pour aller voir de jour le superbe point de vue qui nous entoure et promener notre louloute qui restera dans Robert aujourd’hui : on se voyait mal l’emmener avec nous, surtout si elle nous fait le coup du « sitting » en protestation, ça l’aurait moyen fait. Nous sommes déjà à 1900m d’altitude, à la station et les nuages bouchent la vue sur la ville en bas et la mer au loin. On croise fortement les doigts pour que ça se découvre dans la matinée, mais quand on lève les yeux du côté du sommet de l’Etna, ça n’est pas mieux. « On aura au moins grimper sur un volcan. » Nous nous acquittons de la note de 100€ par personne (50€ pour le guide et 50€ pour la montée en bus 4×4 car le téléphérique est en maintenance.) On sent que c’est la fin du voyage, on ouvre les vannes. Après quelques conseils de notre guide, Nino, nous mettons nos chaussures de rando aux pieds et je prends mon méga pull orange dans le sac ; il risque de faire sacrément froid là-haut, même si la montée sera physique. Un dernier pipi au restaurant et on se regroupe tous pour les premières indications de la randonnée qui nous attend : bus 4×4 jusqu’à 2500m et on marche jusqu’à 2900m maximum, puis retour par un cratère secondaire jusqu’au départ des bus qui nous ramèneront à la station. La météo est plutôt satisfaisante avec peu de vent au sommet pour le moment.
Nous sommes un petit groupe d’une dizaine de personnes avec deux autres couples de francophone ; naturellement, on forme un « clan linguistique », trop contents de pouvoir papoter avec des inconnus. Et c’est parti pour rejoindre les fameux bus 4×4 « avec ça, pas de soucis pour aller jusqu’en Mongolie ! » et on se fait remonter jusqu’à 2500m d’altitude par de nombreux lacets dans ce paysage noir désertique très particulier. Plus on monte et plus nous entrons dans le nuage. C’est rageant d’avoir une vue complètement bouchée, on ne voit pas à 10m. Tout le monde enfile gants et bonnets, et on entame notre « trekking ». Le guide est un soixantenaire très attentif aux gens qui nous donne les explications en bilingue anglais/français. Trop bien de pouvoir poser toutes les questions qui nous viennent en tête, il est hyper calé sur son sujet et il ne lésine pas sur des croquis dessinés dans la neige pour qu’on comprenne bien quelle bête de volcan complexe nous avons devant et sous nos pieds et son fonctionnement.
C’est une vraie expérience « on est sur un volcan quoi ! » On n’en revient pas. La neige encore intacte ajoute une touche vraiment spéciale à ce paysage. Un contraste blanc/noir superbe. Nous nous suivons en file indienne, pas après pas, traces dans traces, plus on monte et moins nous parlons. Il faut garder de l’air et des forces, même si la progression se fait lentement mais sûrement.
« Mesdames, messieurs, enfilez les casques, prego. E amouliné (« en avant », en sicilien) » On s’engouffre directement dans une coulée de lave datant de 2002, formant une sorte de grotte au début pour terminer en canyon dont les parois en mille-feuille nous montre les différentes vagues de laves séchées. « Incroyable ! »
Une petite grimpette pour sortir de ce tunnel et, hop miracle !, on est passé au-dessus des nuages et un beau soleil nous réchauffe . « Incroyable ! » Autour de nous, des amoncellements de roches volcaniques dont parfois une percée nous envoie de l’air chaud empli de souffre au visage et on n’hésite pas à retirer nos gants pour sentir cette chaleur sur nos mains fraîches. « Incroyable ! » Je n’arrive pas à dire autre chose, c’est exceptionnel. On a un sourire gigantesque « ce voyage nous réservait encore bien des surprises. »
On monte, on monte pour aller crapahuter sur la coulée de lave de 2023 et se faire notre pose pique-nique un peu à l’abri du vent qui vient nous chatouiller le dos. La roche sous nos fesses est quasi coupante, d’un noir sombre et brillant à la fois. Nous engloutissons notre sandwich et « aventi », il faut déjà repartir. Encore quelques mètres et nous nous arrêtons au maximum autorisé, à 2900m. En effet, l’Etna est entré en éruption le 4 Juillet de cette année et le volcan est toujours très actif et de nombreux gaz empêchent d’aller plus haut. Depuis cette date, le point culminant a augmenté de 100m et se trouve sur un autre cratère que le cratère principal, à 3410m. C’est fou de se dire que tous les ans presque, ce volcan évolue dans sa forme, dans ses tracés, dans ses cratères (ils sont plus de 250 morts autour). Une claque ! Et avec ce soleil, on voit très bien le sommet et les effluves de fumée qui s’échappent tout en haut.
Nous entamons la redescente et Nino, aventurier dans l’âme probablement, ne veut pas marcher dans les traces des autres guides et nous fait passer dans la poudreuse et faisons nos propres traces. On rit comme des bien-heureux devant ce sublime paysage, le sucre du repas fait son office et l’adrénaline avec. Normalement, nous devions aller voir la grande vallée formée en contre-bas par le glissement des multiples éruptions mais les nuages sont toujours en tapis. Nino nous propose donc plutôt de grimper sur ce gros cratère, en face de nous et même d’y faire un tour à l’intérieur. Notre petite troupe est partante et nous voilà reparti à l’assaut de cette pente volcanique. Nous sommes au sommet du cratère de 2001 et nous progressons légèrement sur le côté pour aller creuser et toucher directement dans le sable la chaleur qui se dégage encore de la-dessous. C’est incroyable de se dire que 20 ans après, il y a encore du gaz prisonnier et que nous marchons sur la fissure qui trace véritablement une ligne de cratères. Quelle expérience !
Nous terminons notre descente, encore et toujours, les pieds dans la neige pour aller reprend le bus 4×4 en sens inverse, qui nous ramène à la station et immanquablement dans le nuage aussi. Après 5h d’excursion nous sommes fatigués et en même temps plein d’une énergie de conquérant. Nous retrouvons une Lola surexcitée qui nous fera faire un tour sur un petit cratère très facilement accessible ; comme si on n’en avait pas eu assez… De retour au restaurant, nous nous asseyons avec un des couples qui a randonné avec nous aujourd’hui pour papoter encore un peu, au chaud, devant un café.
17h déjà quand nous prenons notre Robert frigorifié. Notre guide nous a indiqué une randonnée à faire à 5mn de là dans la forêt aux pieds de l’Etna à 1700m. Nous y trouvons un parking en dur, pile au départ des sentiers. La météo de demain n’est pas folichonne donc on se laisse les devoirs pour demain matin sous la neige. 18H30 on mange et 20h sous les couettes devant « Tais-toi » avec Reno et Depardieu, tellement jeunes. Ce soir, un petit coup de chauffage s’impose et on sort toutes nos couettes et nos plaids « mais on est venu en Sicile pour la chaleur ?! (rire) »
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